Le Conseil d’État fribourgeois a décidé aujourd’hui de retirer le budget 2026, invoquant l’incertitude liée au lancement d’un référendum contre le PAFE. Le Parti socialiste fribourgeois dénonce un hold-up démocratique qui traduit une perte de maîtrise inquiétante de la part du gouvernement. La population est pleinement légitime à se prononcer sur le PAFE. En cherchant à faire porter sur le vote populaire la responsabilité de ses propres errements budgétaires, le Conseil d’État bafoue les droits démocratiques et détourne l’attention de ses manquements.
Lors de l’élaboration de tout budget, il existe toujours des impondérables et des inconnues, qui dépassent parfois largement les montants engagés par le PAFE et perturbent la tenue des objectifs budgétaires. C’est le cas, par exemple, des coupes récurrentes décidées par la Confédération, susceptibles d’intervenir à tout moment. À l’inverse, il arrive que la BNS enregistre des bénéfices inattendus, influençant positivement les comptes publics. Au niveau cantonal, des négociations salariales peuvent également aboutir en cours d’exercice, impactant le budget dans un sens ou dans l’autre. Les droits populaires – et plus précisément le lancement d’un référendum – font partie de ces impondérables. Le Conseil d’État aurait dû en tenir compte et, le cas échéant, composer avec. Le Parti socialiste ne voit aucune raison de ne pas laisser le Grand Conseil exercer ses obligations légales, à savoir débattre et adopter le budget. Le Conseil d’Etat crée aujourd’hui un précédent grave.
Le Parti socialiste le rappelle : disposant d’une majorité confortable au Grand Conseil, le Conseil d’État porte la responsabilité pleine et entière de la dégradation des finances cantonales, tout comme il maîtrise seul le calendrier budgétaire. Alors qu’il annonçait déjà des mesures d’assainissement lors de la publication des comptes 2023, il n’a rien entrepris pendant une année, avant de rédiger dans la précipitation un plan d’assainissement en quelques semaines, écourtant au passage le délai de consultation. Concrètement, le Conseil d’Etat aurait parfaitement pu présenter le PAFE à la fin de l’année 2024, ou encore proposer une variante budgétaire sans celui-ci, afin de respecter le processus démocratique lié au référendum. À titre de comparaison, la Conseillère fédérale Karin Keller-Sutter a, elle, prévu un délai de consultation adéquat et tenu compte d’un éventuel référendum avant l’entrée en vigueur du programme d’allègement de la Confédération.
Aussi, le PS s’interroge sur la légalité du retrait. En effet, la Loi sur les finances de l’Etat (LFE) ne prévoit aucun scénario où le budget pourrait être retiré par le Conseil d’Etat. Quant à la possibilité de retrait prévu par la Loi sur le Grand Conseil (LGC), elle ne s’applique qu’aux projets législatifs ou aux rapports et donc pas au budget. En pratique, cela signifie que le budget n’est pas bloqué et doit être voté par le Grand Conseil jusqu’au 31 décembre 2025. Seules les économies prévues par la LAFE sont bloquées jusqu’à son entrée en vigueur.
Enfin – et c’est le seul point de convergence entre le Parti socialiste et le Conseil d’État – il convient de rappeler que l’État continuera de fonctionner, ceci sur la base du budget 2025. Le personnel sera donc rémunéré, et la population continuera de bénéficier de prestations essentielles.
La décision prise aujourd’hui traduit la fébrilité et l’incohérence du Conseil d’État. Elle sera perçue comme une forme de prise d’otage de la population, à qui l’on fait payer, en plus de l’austérité ambiante, les conséquences d’une mauvaise planification politique. En renonçant à laisser le Grand Conseil débattre et adopter le budget, le gouvernement outrepasse largement ses compétences sous le regard complice de la majorité de droite du Parlement.

